Le détective Paul X a toujours rêvé d’être comédien.
Lorsqu’il s’endort il se voit intervenir en tant que détective sur différentes scènes dans différents genres théâtraux : boulevard, farce, tragédie, comédie policière.
Mais sera-t-il accepté par les personnages de théâtre et/ou les comédien(ne)s ou sera-t-il considéré comme un élément perturbateur ?
Quel sera son rôle dans ces différentes scènes ?
Au cours de ses pérégrinations Paul X se demande s’il vit un rêve éveillé et si la réalité théâtrale est pure imaginaire.
Il s’agit dans cette pièce d’aborder différents genres théâtraux et de s’interroger avec humour sur l’art théâtral.
DISTRIBUTION : 11 F et 15 H
Distribution modulable :
- Les personnages peuvent être joués par un homme ou une femme
- Un comédien ou une comédienne peuvent jouer plusieurs personnages
PERSONNAGES :
par ordre d’entrée en scène :
Paul X, détective privé (H)
SCÈNE 2
Monsieur Un, Mademoiselle Unetelle, Joséphine, Jacques Z
(2 F et 2 H)
SCÈNE 3
André (H)
Son amie (F)
SCÈNE 4
Le roi D’Urubu, la reine D’Urubu, le capitaine Pitaine (2H et 1F)
SCÈNE 5
Le chevalier d’Éon, la comtesse, le comte (1 F et 2 H ou 1 H et 2 F)
SCÈNE V
Juliette, Roméo, Christophe, Lulu (2 F et 2 H)
SCÈNE VI
Oreste, Pylade, Racine, Electre (3 H et 1 F)
SCÈNE VII
Lydia, Eva, Luc, Joachim
(3 F et 1 H)
(Les serviteurs et les journalistes de la scène 5 peuvent être joués par d’autres comédien(ne)s de la distribution)
SCÉNE I
Paul X : (il répond sur son portable) Mais, mon vieux, c’est fini l’image du détective privé planqué derrière un buisson avec un appareil photo et un magnéto. C’est fini le détective avec sa loupe, fumant la pipe, vêtu d’un trench-coat et portant un stetson sur la tête. Aujourd’hui le détective privé est appelé «agent de recherches privé » ou encore « enquêteur ». Il porte un costume chic, noir de préférence, et se balade avec sa tablette. Il est expert en informatique et est capable de démembrer un ordi pour trouver une information cachée au fond d’un disque dur. Que veux- tu, mon temps est terminé. Mais si. Tu sais vraiment quel métier j’aurais voulu exercer ? Mais non, pas policier. J’aurais voulu être comédien. Oui, comédien, afin de pouvoir jouer différents personnages. Tiens, avec mon profil j’aurais pu être un détective théâtral et mener des enquêtes sur scène. J’aurais pu par exemple enquêter sur les assassinats dans la tragédie grecque ou sur un crime dans le théâtre de boulevard du crime. Ou pourquoi pas être le héros d’une comédie policière ? (déçu) Mais je ne suis que Paul X un petit détective privé qui ressemble à tout le monde. Pourquoi Paul X ? Mais je te l’ai répété des dizaines de fois : c’est pour garder l’anonymat sur toutes les affaires que je traite et pour que mes clients soient assurés de ma discrétion. (Un temps) Enfin mes clients… mes clients se font plutôt attendre ces derniers temps. En ce moment je n’ai aucune affaire en vue. Voilà. Allez, à bientôt, l’ami, merci de ton appel. Oui, oui, tu passes quand tu veux. (pour lui-même et au public) Ah, si j’étais comédien… (Il baille) on peut toujours rêver. Mais le théâtre n’est ce pas un rêve éveillé ? (Il baille) En attendant un éventuel client je vais roupillotter un petit peu. (Le noir se fait sur scène et on entend Paul X ronfler)
NOIR
SCÈNE II
Joséphine, Unetelle, Un, Jacques Z, Paul X
(Entrée de Joséphine, Unetelle, Un, Jacques Z)
Joséphine : Mais quand est ce qu’il va venir ?
Unetelle : Vous êtes sûrs que le casting a bien lieu ici et aujourd’hui ?
Un : Tout à fait.
Jacques Z : (montrant une feuille de papier) Voilà la convocation : cherche personnages pour ma prochaine pièce.
Un : (Il fait des effets de voix) AH ! AH ! AH ! AH ! AH ! OH ! OH ! OH ! OH ! OH !
Unetelle : Vous pensez que ce sont des personnages à voix qu’il cherche ?
Un : Pourquoi ? Vous êtes muette ?
Unetelle : Non, mais je ne suis pas une soprano.
Jacques Z : Chacun doit faire entendre sa voix auprès de lui, voilà tout.
(Entrée de Paul X)
Paul X : (un peu gêné) Bonjour.
Joséphine : Ah, voilà l’auteur !
Un : Enfin ! Ce n’est pas trop tôt.
Unetelle : Nous vous attendions.
Jacques Z : Avec impatience.
Paul X : (étonné) L’auteur ?
Unetelle : L’auteur de la pièce dont nous serons bientôt les personnages.
Un : Evidemment.
Paul X : Vous faites erreur. Je me suis perdu dans les couloirs de mes rêves et je cherche la sortie. Pourriez vous me dire où nous nous trouvons ?
Un : Mais nous sommes sur une scène de théâââtre, Monsieur, et nous attendons l’auteur. Je me présente : Un.
Paul X : Un ? Pourquoi Un ?
Un : Parce que j’étais le premier à arriver. Je devrais donc avoir le premier rôle.
Unetelle : Eh, doucement, c’est peut-être une première rôle que l’auteur a prévu.
Jacques Z : Ou un second rôle qui peut devenir un premier. Vous savez comme on dit souvent : les derniers seront les premiers.
Joséphine : (s’adressant à Un) Et, méfiez vous, les jeunes premiers peuvent devenir des vieux derniers. (Tous rient de Un, sauf Un et Paul X)
Unetelle : (à Paul X) Moi, je suis Mademoiselle Unetelle.
Paul X : Mademoiselle Unetelle ?
Unetelle : Oui, car je n’ai pas encore été distribué.
Paul X : Distribué ? Il y a une distribution ? Une distribution de prix ?
Jacques Z : Pas encore, bien que nous espérions tous obtenir un Molière un jour ou l’autre. En fait il s’agit d’une distribution de personnages et nous ne savons pas encore quel sera notre personnage.
Paul X : (étonné) Ah, oui ?
Joséphine : Moi, c’est Joséphine
Un : Tiens, vous, vous avez un prénom ?
Joséphine : Ben oui
Un : Qui vous l’a donné ?
Joséphine : Ça a toujours été mon prénom.
Un : Depuis quand ?
Joséphine : Depuis… depuis ma naissance
Un : Vous voulez dire depuis la naissance de votre personnage.
Joséphine : Euh… Oui, bien sûr.
Un : Vous connaissez l’auteur de vos jours ?
Joséphine : (gênée) N… Non, pas encore.
Un : Alors qu’est ce que vous racontez ? Il n’y a que l’auteur qui peut vous donner un prénom. Vous avez inventé votre prénom.
Joséphine : (émue) Puisque je vous dis que je m’appelle Joséphine.
Un : On verra ça, quand il sera là.
Paul X : Moi, je m’appelle X.
Unetelle : Vous n’avez pas de nom.
Paul X : Mon nom c’est X.
Unetelle : Mais X est une lettre.
Un : Anonyme…
Jacques Z : C’est normal qu’il s’appelle X, il est comme nous en quête d’auteur. L’auteur lui donnera bien un nom, comme à moi. Je n’ai pas été distribué non plus. Si vous êtes X, je serai peut-être Y ou Z. Pierre …Paul… Jacques
Paul X : Moi, c’est Paul X.
Jacques Z : Eh bien, je pourrai m’appeler Jacques Z ce sera à l’auteur de décider.
Un : (agacé) Il se fait tout de même attendre.
Paul X : L’auteur que vous attendez est il connu ou inconnu ?
Un : Je ne sais pas, je ne le connais pas.
Unetelle : Moi non plus.
Joséphine : Ni moi.
Jacques Z : Ni moi.
Paul X : Alors c’est un auteur inconnu.
Un : Vous vous moquez. Vous croyez que nous serions venus ici pour devenir les personnages d’une pièce d’un auteur inconnu.
Unetelle : Oui, c’est vrai.
(Un court temps)
Joséphine : Je ne sais pas si j’aurai la tête de l’emploi
Paul X : La tête de quel emploi ? Un emploi de bureau ? Un emploi commercial ?
Tous ensemble : Un emploi de théâtre, voyons.
Paul X : Un emploi de théâtre ? Habilleuse ? Ouvreuse ?
Joséphine : Mais non. Je parle des emplois d’ingénue ou de coquette.
Unetelle : Ou amoureuse. Ô comme j’aimerais jouer les amoureuses !
Joséphine : Vous ? Je ne trouve pas que vous ayez la tête de l’emploi.
Unetelle : Et quelle est la tête de l’emploi d’amoureuse ?
Joséphine : Plutôt la mienne.
Unetelle : Vous ? Vous ne ressemblez à rien. Vous avez un visage passe partout.
Joséphine : Vous avez beau faire, je ne me mettrai pas en colère. Mais un visage « passe partout », comme vous dites, permet de faire bonne figure. Moi, je ne suis pas une fille des rues qu’on appelle « Unetelle ». J’ai un prénom, moi.
Unetelle : Un prénom qui ne vous appartient pas.
Jacques Z : Allons, Mesdemoiselles, calmez-vous. Nous ne savons pas encore qui nous serons et pour l’instant nous ne ressemblons à rien c'est-à-dire à monsieur et madame tout le monde. Vous savez bien que c’est l’auteur qui déterminera nos emplois.
Un : C’est tout de même regrettable que ce soit toujours l’auteur qui décide des emplois et des rôles. Nous avons, nous aussi, notre mot à dire sur le personnage que nous devons incarner.
(Un temps)
Jacques Z : Vous avez raison, il faudra lui signifier, car nous sommes capables d’improviser si besoin est.
Tous : Tout à fait.
Jacques Z : Qu’il nous donne un emploi, d’accord, mais nous pouvons avoir notre propre vision de cet emploi.
Un : Bien sûr. Nous pouvons qualifier ces emplois, parce que nous avons de l’expérience tout de même. Nous portons la parole des auteurs, certes, mais l’encre des textes est irriguée de notre sang.
Unetelle : Les mots vivent par notre chair.
Joséphine : Les personnages ont notre cœur qui bat en eux.
Un : Il y a intérêt à ce que ces messieurs les auteurs n’oublient pas cela.
Unetelle et Joséphine : Tout à fait.
Jacques Z : Dites, Paul X, qu’est ce que vous faites dans la vraie vie, quand vous n’êtes pas un futur personnage de théâtre.
Paul X : Je suis détective.
Jacques Z : Détective. Le détective vient ici pour rechercher… un emploi théâtral ?
Paul X : Eh bien …
Un : Vous voyez, moi, qui suis UN aujourd’hui, je suis pourtant plusieurs à la fois : je suis moi-même, mais aussi mézigue, bibi et ego.
Jacques Z : (à UN) Vous devriez écrire votre autobiographie et en faire un spectacle comme on le voit si souvent aujourd’hui. (Rires)
Un : Vous voulez dire : devenir son propre auteur.
Jacques Z : Pourquoi pas ?
Un : Oui, après tout pourquoi pas. Pouvoir choisir son rôle et refuser de céder à l’auteur.
Unetelle : C’est quand même risqué. Je me vois mal devenir un personnage sans auteur.
Paul X : (réfléchissant) C’est tout de même difficile de s’imaginer dans la peau d’un autre. (aux autres) Mais, moi, j’ai une vie antérieure et une histoire intérieure, je suis détective et je mène des enquêtes.
Jacques Z : (souriant) Des enquêtes d’identité ?
Paul X : Non, non, des enquêtes policières.
Jacques Z : Ah, très bien. Et qui a écrit les scénarios de ces enquêtes ? Conan Doyle ? Agatha Christie ?
Paul X : Non, non, c’est moi, ce sont mes enquêtes.
Jacques Z : Allons, Monsieur X, nous sommes tous en quête d’auteur, vous, comme les autres, sinon vous ne seriez pas là.
Joséphine : Remarquez, je vous verrai bien jouer un personnage de détective,
vous avez le look. Mais y a-t-il un rôle de détective prévu dans la distribution ? Vous n’en savez rien.
Paul X : (pour lui-même, au public et aux autres) Mais qu’est ce que je viens faire dans cette histoire ? Cette situation est totalement absurde.
Un : Evidemment que c’est absurde, nous sommes tous des personnages du théâtre de l’absurde.
Jacques Z : Mais la réalité vraie n’est elle pas aussi absurde que la fiction inventée ?
Voix off : Message à toutes et à tous ! Suite à un contretemps indépendant de sa volonté, l’auteur ne pourra pas être présent aujourd’hui. Nous vous demandons de l’excuser, nous prendrons vos coordonnées pour une prochaine audition.
(Ils râlent tous)
Un : C’est incroyable, je suis sûr qu’il fait passer un casting ailleurs pour les mêmes personnages et pour donner les rôles à je ne sais qui. Mais, moi, Monsieur l’auteur, je ne suis pas n’importe qui et je me plaindrai auprès du comité de sélection des personnages ! Auprès du syndicat des personnages ! (cherchant) Auprès…auprès du Pôle Emploi de théâtre !
Jacques Z : Calmez-vous. Calmez-vous. Il reviendra une autre fois.
Joséphine : Mais pourquoi reviendrait-il ?
Unetelle : C’était pourtant aujourd’hui que nous étions convoqués.
Jacques Z : Qu’est ce que cela signifie aujourd’hui au théâtre ? Le temps au théâtre n’est pas celui de la réalité.
Unetelle : Excusez, mais il faut un peu de vraisemblance tout de même. Il est nécessaire qu’au théâtre il y ait une unité de temps, de lieu et d’action afin que le spectateur s’y retrouve.
Paul X : Je ne sais pas si le spectateur s’y retrouve, mais moi je ne m’y retrouve pas. Je ne sais pas si je suis moi-même « Paul X » ou un personnage de théâtre nommé « Paul X ».
Jacques Z : Pour l’instant vous n’êtes personne, Monsieur X, puisque l’auteur ne vous a pas fait entrer dans la peau d’un personnage.
Un : Moi, en tous cas je vais de ce pas à la SACD.
Paul X : Qu’est ce que c’est, la SACD ?
Un : La Société des Auteurs des Caractères Dramatiques, ils vont m’entendre. Car c’est tout de même nous qui faisons vivre leurs personnages. Pas vrai ?
Unetelle : Vous avez raison.
Un : Ils vont voir comment je m’appelle.
Jacques Z : Pour l’instant vous ne vous appelez que Un.
Un : (gêné) Euh, oui … (un court temps) mais peu importe. S’il n’en reste qu’un je serai celui-là (Il sort)
Joséphine : J’aurais bien voulu trouver un emploi. Tant pis, je serai amoureuse une autre fois. (Elle sort)
Unetelle : C’est quand même fâcheux de se retrouver dans la rue et d’être à nouveau une quidam inconnue parmi les inconnus. Pourvu que je devienne un personnage au prochain casting afin de sortir de l’anonymat. (Elle sort)
Jacques Z : Moi aussi je voudrais bien ne plus passer incognito. J’attends toujours le créateur qui m’appellera « Dieu sait qui ». (à Paul X) Salut Paul X. (Il sort)
Paul X : Salut Jacques Z. Et voilà, ils sont tous partis sans personnage. Heureusement que, moi, je suis un personnage, quoiqu’ils disent. (Un temps, s’adressant à lui-même) Mais non, voyons, tu n’es pas un personnage, tu es le détective Paul X et tu rêves. Oui, voilà la vérité. (Un temps de réflexion) La vérité… Quelle vérité ? C’est tout de même dommage que je ne puisse pas rencontrer l’auteur de mes rêves. (Il sort)
NOIR
SCÉNE III
André : Bonjour à tous. Je me présente : André, androïde anthropomorphe. Je pense que vous ne connaissez pas beaucoup d’androïdes qui font des one humanoïdes shows, pas vrai ? Je dois faire partie des premiers. J’innove. Mais vous ne pouvez pas vous imaginer, Mesdames, Messieurs, comme la vie d’un androïde peut être dangereuse. Tenez, je vais vous raconter ce qui m’est arrivé ce matin. Comme chaque matin je me suis levé et j’ai commencé mes rites habituels. D’abord le passage à la cabine défécation hygiénique aseptisée. Puis direction le lavatorium pour aspersion de la carcasse, décrottage du museau et ratissage de la tignasse. (Un temps) Mais ce matin, alors que j’étais en train de me racler les poils avec mon rasoir laser, voilà-t-il-pas que je me tranche un bout de couenne. Des flots d’hémoglobine et d’huile de vidange ont commencé à se répandre sur le carrelage. Je suis resté zen, j’ai rassemblé mes esprits et ma chair fraîche sanguinolente pour fourrer le tout dans ma cuirasse trois pièces. Mais c’est alors que la plaque de réchauffement de mon poumon droit a commencé à refroidir ! Je me suis dit : « Si ça continue comme ça je vais être en retard au boulot ». Heureusement que je suis bricoleur ! Un coup de tournevis par ci, un tour d’écrou par là et quelques minutes plus tard mon poumon carburait de nouveau. Mais comme j’étais à la bourre je suis parti en courant sans même m’être rafraîchi l’œsophage, ni m’être sustenté l’estomac, et au bout de même pas trois foulées voilà-t-il pas que je me pète un boulon, que je me coule une bielle et que je m’empanne sèchement. J’appelle alors de mes prières le SAINTMU. Aussitôt les paras médicaux sont tombés du ciel et ont débarqué en sautant de leurs hélicos anti-bactéries. Ils m’ont bouché à bouche dare-dare, ils m’ont baffé la tronche avec frénésie, ils m’ont entubé l’œsophage, j’ai tout juste réussi à éviter la peine de mort. Ouf, je m’en suis sorti à moitié sain, à moitié sauf. (sonnerie de téléphone. André se penche sur sa manche et parle) Allo Doc, c’est vous. Oui, j’ai eu un moment de faiblesse ce matin, heureusement tout est revenu à la normale. Attendez, je prends une grande bouffée d’oxygène nécessaire pour remettre mes neurones en place et je me mets en mode fonctionnement automatique. (répondant) Confirmation des données ? OK, Doc. (sortant et regardant un portable) J’ai la rate qui se dilate… le foie qu’est bien droit… ma connexion au réseau social est correcte. Je rebranche mon œil télescopique à la caméra de surveillance, je déverrouille mon système nerveux de sécurité et je sauvegarde mon anti virus et …mon anti allergie, bien sûr. (Entrée de Paul X) Tout est OK, Doc. Pas de problème. A plus tard. (s’adresse au public) Doc m’a offert ce joli bracelet électronique GPS permettant de me géo-localiser. (Il aperçoit Paul X et commence à ne plus jouer son texte, mais à le dire sur un ton neutre) Doc a toujours peur de me perdre, il faut dire que suis un humanoïde « nouvelles technologies » qui coûte bonbon.
André : (s’adressant à Paul X) Eh, vous, qui vous permis d’interrompre mon spectacle !? Je n’ai besoin de personne. C’est un stand up, un one man show réalisé par un self made man. Vous venez de la part de qui ? (paniqué) Ah, pardon. Vous …vous n’êtes pas l’huissier envoyé par le propriétaire de la salle ? Attendez, monsieur l’huissier, ne nous emballons pas, je vais payer la location de la salle, pas de problème, ce n’est qu’une question de jours. Vous voyez je suis en pleine répétition. Vous ne voulez pas m’enlever mon gagne pain ? Sinon… (plastronnant) sinon je ferai une grève de la faim dans cette salle et j’en appellerai à tous les comédiens et comédiennes alentour pour qu’ils viennent soutenir mon action. Ce n’est qu’un début, continuons le combat. (à Paul X) Mais dîtes quelque chose !
Paul X : Je ne suis pas huissier.
André : Ouf, tant mieux, alors qui êtes-vous ?
Paul X : Je m’appelle Paul X
André : Paul X, pourquoi ne voulez vous pas dire votre nom.
Paul X : Mais c’est le mien, X Paul. Je suis détective.
André : (excité) C’est pas vrai ! Un détective envoyé par la SACD ! (Au public) Vous savez, c’est la société des auteurs et compositeurs dramatiques ! C’est bien ma veine. Maintenant ils envoient des détectives pour nous épier pendant les répétitions. (à Paul X) Sachez que je suis en règle, Monsieur, je paie mes droits d’auteur à l’auteur, d’ailleurs l’auteur c’est moi, je paie la location de la salle en tous cas je vais la payer. S’il le faut je paierai des spectateurs pour venir voir mon spectacle pour que vous puissiez juger de la fréquentation.
Paul X : Vous vous méprenez je suis seulement détective privé et je suis entré ici par hasard.
André : Ah, tant mieux !
Paul X : Ainsi vous répétez un one man show.
André : Tout à fait. Voyez vous le stand up c’est ma strart-up, j’ai investi tout mon fric dans ce spectacle, si ça ne marche pas, je risque de tout perdre. Je cherche un sponsor.
Paul X : Et c’est votre seul job « stand-uppeur » ?
André : Non, non, je travaille aussi à la grande Théâtrie Française où je respire les textes des grands auteurs pour mieux les insuffler sur scène.
Paul X : Vous êtes comédien.
André : (gêné) Pas… exactement. Je suis sou…(hésitant). Je suis souffleur.
Paul X : (étonné) Souffleur ! Souffleur de verres ?
André : Souffleur de vers (il articule) v-e-r-s et souffleur de verbe. Vous savez, si je n’étais pas là, le comédien risquerait de perdre le souffle qui anime le texte. (Changeant de ton) Bon, excusez-moi, mais je dois reprendre ma répète. Vous me direz ce que vous en pensez. Il s’agit d’un androïde qui fait part au public de sa drôle d’humanité. (reprenant sa répétition) On m’appelle « Brigadier de la vertu » ma mission c’est de défendre la planète contre les forces du mal. Et, croyez moi, en tant que brigadier de la vertu il faut toujours garder son self control pour éviter les massacres. Par exemple l’autre jour, j’ai participé à une opération punitive appelée « Rameau d’olivier » pour ramener la paix onusienne dans un pays en voie d’occidentalisation donc en voie de civilisation. (Entrée discrète d’Elle) Et pour certaines opérations éprouvantes il faut avoir un cœur blindé d’acier, fort heureusement j’en suis pourvu, ça évite de se faire du mauvais sang.
Elle : (interrompant André et s’adressant à lui) Qu’est ce que tu fais ?
André : Tu le vois bien : je répète.
Elle : Tu répètes !? Mais, cher ami, il faudrait que tu sois comédien pour pouvoir répéter un texte.
André : Qu’est ce que tu racontes ? (hésitant) Je… je suis comédien.
Elle : Allons, André, tu es un inter-mittent. Tu inter-mittes. Tu interviens là il où il y a des trous dans les horaires des autres…des autres comédiens. (riant) Et regarde à quoi tu ressembles.
André : A un androïde. Je ressemble à un androïde. C’est une idée originale. Tu verras que bientôt l’androïde deviendra incontournable sur une scène, (sur un ton lyrique) l’androïde c’est l’avenir de l’homme et… donc l’avenir du comédien.
Elle : (dubitative) Mouais….Mais, dis moi, si tu veux monter sur scène, as-tu obtenu l’autorisation du syndicat des artistes interprètes ?
André : (troublé puis se reprenant) Hein ? Je … je n’ai pas besoin de leur autorisation, j’ai un sponsor.
Elle : Laisse-moi rire.
André : (montrant Paul X) Il est là devant toi.
Elle : Hein ? Vous êtes sponsor ?
Paul X : (gêné) Euh … Je…
Elle : Comment vous appelez vous ?
Paul X : Paul X.
Elle : Paul X ?
André : Tu comprends bien qu’il ne peut pas dévoiler son nom, il représente une grosse agence de communication.
Elle : Ah, oui ? (minaudant auprès de Paul X) Moi, je suis danseuse comme qui dirait orientale.
André : (ironisant) Danseuse orientale ! Plutôt effeuilleuse.
Paul X : Effeuilleuse ?
André : (faisant le geste d’ôter des vêtements) Elle s’effeuille au fur et à mesure qu’elle danse. Vous comprenez ?
Elle : (à Paul X) Il n’a jamais rien compris à l’art chorégraphique. Voyez-vous, j’exprime tous les sentiments avec mon corps. En ce moment je répète le rôle de Salomé pour la danse des sept voiles.
André : Salomé ?
Elle : Vous ne connaissez pas Salomé ? C’est dans la Bible, Salomé vêtue de sept voiles danse à la demande du roi Hérode. Elle enlève au fur et à mesure ses voiles et à la fin …
André : (à Paul X) Elle finit nue… pour le plus grand plaisir des octogénaires.
Pour connaitre la suite de cette pièce écrivez moi à : jpduru@club-internet.fr